Les locataires aux trop hauts revenus devront peut-être quitter les logements sociaux. C’est en tout cas ce que souhaite Guillaume Kasbarian, ministre délégué au logement, qui inscrira la mesure dans un projet de loi présenté début mai.
« Quand on a 5,2 millions de logements sociaux en France et 1,8 million de ménages qui candidatent légitimement pour y entrer, est-il normal qu’ils soient empêchés de le faire alors qu’il y a des gens au sein du parc social dont la situation a largement changé depuis qu’ils se sont vu attribuer leur logement ? » Voilà la question que se pose Guillaume Kasbarian, dans les pages du magazine Les Échos le 12 avril dernier. Pour y répondre, le ministre délégué au logement propose de pousser vers la sortie les ménages devenus trop “riches” pour habiter un logement social et d’en finir avec cette notion de logement social “à vie”.
Selon lui, 8% des personnes habitant en HLM ne seraient pas éligibles aujourd’hui à un logement social du même type que celui qu’ils occupent actuellement. Il veut donc demander aux bailleurs sociaux une “évaluation régulière et obligatoire” des locataires pour être au fait de l’évolution de leur situation financière et patrimoniale. Il souhaite également que les maires aient plus de pouvoir dans l’attribution des logements sociaux et dans la décision d’en vendre. Enfin, le ministre a assuré le maintien des objectifs de 20 à 25% de logements sociaux dans les zones concernées par la loi SRU (Solidarité et Renouvelle Urbain).
Des mesures qui ne font pas l’unanimité
Ces mesures seront inscrites dans un projet de loi présenté en Conseil des Ministres au début du mois de mai prochain pour être ensuite examiné au Sénat début juin. Or, elles ont suscité de vives réactions de la part des bailleurs sociaux et de la gauche. Pour Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union Sociale pour l’Habitat, “le ministre parle d'un bail à vie qui n'existe pas”. Pour la Confédération Nationale du Logement, les propositions de Guillaume Kasbarian ne font “qu’opposer les classes populaires entre elles et épargner les plus riches et la spéculation immobilière”. Même réaction outrée de la part de Ian Brossat, sénateur communiste de Paris, qui parle de “ghettoïsation de nos HLM”.
Des règles qui existent déjà
Si les mesures du ministre font autant bondir, c’est aussi parce que certaines règles qu’il propose existent déjà. En effet, les bailleurs sociaux ont l’obligation de faire des enquêtes locataires annuelles pour vérifier les revenus de leurs résidents - en exigeant leur dernier avis d’imposition. Si les revenus du foyer dépassent de 20% le plafond maximal, le résident pourra alors être soumis à un surloyer. De plus, si ses revenus augmentent encore et dépassent le plafond pendant deux années de suite, le bailleur peut décider de ne pas renouveler le bail.
Le problème est donc plus une affaire de manque de constructions de logements sociaux, comme le signale Christophe Robert, directeur général de la Fondation Abbé Pierre. Selon lui, il faudrait “développer l’offre de logement social en France” pour permettre à tous les ménages en attente d’être enfin logés.